Ernest-Antoine Seillière :“Joyeux Noël, les chômeurs et les précaires !”

Le PARE, mis en place en juillet 2001 par le MEDEF, la CFDT et le gouvernement Jospin, devait permettre un retour rapide à l’emploi des chômeurs, grâce à un suivi et un contrôle accentué de la part de l’ANPE. Ils avaient peut-être oublié que ce ne sont ni les chômeur ni l’ANPE qui sont responsables du chômage, mais les patrons qui préfèrent licencier pour sauver leurs profits en période de crise du capitalisme (et augmenter leurs profits en période stable). Un an et demi après, l’UNEDIC est en déficit de 3,7 milliards d’euros.

Article paru dans l’Egalité n°99

Le MEDEF, la CFDT et la CGC, avec la bienveillance du gouvernement Raffarin, ont pondu un accord de sauvetage de l’UNEDIC qui prévoit le retour à l’équilibre d’exploitation pour 2004 et à l’équilibre de trésorerie pour 2005. Ce plan, encore une fois, se fait au détriment des intérêts des chômeurs et des salariés : les cotisations passeront ainsi le 1er janvier de 5,80% à 6,40% du salaire (4% pour l’entreprise et 2,4% pour le salarié). Les chômeurs, quant à eux, verront leurs cotisations au régime des retraites complémentaires augmenter de 1,2% à 3%.

A cela s’ajoutera une réforme des filières d’indemnisation, ramenées de huit à quatre, qui durcira les conditions d’accès aux prestations de chômage pour les travailleurs précaires et réduira la durée d’indemnisation des chômeurs de 50 ans et plus. Les précaires devront avoir travaillé six mois au cours des 22 derniers mois, et non plus quatre mois sur 18 mois, pour prétendre aux prestations de l’Unedic pendant sept mois, ce qui, selon les signataires du protocole, vise à lutter contre un recours abusif aux contrats à durée déterminée – autrement dit, les patrons ont recours de façon abusive aux contrats précaires (CDD, intérim, etc.), faisons-le payer aux travailleurs précaires. Les chômeurs de 50 ans et plus seront indemnisés pendant 36 mois au lieu de 45 actuellement et l’indemnisation jusqu’à l’âge de la retraite ne sera garantie qu’à partir de 57 ans contre 55. Ce plan d’économie est supporté au deux tiers par les chômeurs, les précaires et les salariés en général.

Parallèlement, le gouvernement Raffarin-Fillon est en train de faire plancher les deux chambres parlementaires sur une révision du Revenu minimum d’insertion (RMI). Le but est de le transformer en Revenu minimum d’activité (RMA) : ainsi pour percevoir cette aide minimale de l’Etat, il faudra travailler. Selon les tenants de cette mesure, elle doit favoriser un retour à l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail – celles qui se retrouvent avec les minima sociaux comme seul revenu – qui ont tendance à refuser les emplois proposés car l’écart entre le revenu d’activité et les minima sociaux est trop faible. Ces messieurs n’imaginent pas que, plutôt d’instaurer le « travail obligatoire », il suffirait d’augmenter les salaires !

Cette obligation de travail, n’est pas une idée nouvelle, elle traîne dans les tiroirs depuis l’instauration du RMI par le PS. Ce genre de contrat précaire, comme les CES ou les contrats dans les associations d’insertion, ne permet pas une insertion sociale et professionnelle, car ce sont en général des travaux peu ou pas qualifiés sans formation professionnelle. Ils maintiennent au contraire les populations les plus fragilisées dans la misère et la précarité. D’autre part, ces contrats sont des armes aux mains du patronat afin d’attaquer les conventions collectives, les conditions de travail et les salaires de tous les travailleurs.Avec la mise en place du PARE, dont le but essentiel dans l’esprit du MEDEF était d’obliger les chômeurs à accepter n’importe quel emploi sous la menace de radiation – ce qui est en parti réalisé puisque le nombre de radiations a augmenté en un an de près de 80% (bien que les agents ANPE, dépossédés partiellement du pouvoir d’évaluer la situation individuelle, puisque les radiations sont en partie automatiques, s’y opposent encore globalement. C’est l’une des raisons des incessantes attaques du MEDEF contre l’ANPE) – le patronat, suivi docilement par la CFDT, réinvente le Service du Travail Obligatoire.

Par Yann Venier