Manifestations contre les menaces de la Troïka et en soutien aux travailleurs grecs jeudi 2 juillet. Pour la victoire du « NON »

troika_outPour la victoire du «Non»! Pour une campagne de masse de la classe des travailleur en riposte à celle de la Troïka! Pour la défense de politiques socialistes!

Les développements de la situation grecque ont jeté toute la zone euro dans la crise et menacent son existence même. Les banques grecques ont été fermées ce lundi après que la Banque centrale européenne (BCE) a stoppé la ligne de liquidité qui a maintenu ces banques à flot pendant de long mois concernant leurs dépôts. Au moment de la publication de cet article, il fallait encore voir si le dernier paiement de la Grèce au FMI dû pour le 30 juin allait être effectué. La Grèce se dirige probablement vers un défaut de paiement.

Par Andreas Payiatsos et Niall Mulholland

Tout cela est survenu après que le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, au nom du cabinet grec, a appelé à la tenue d’un référendum le 5 juillet en proposant de voter «Non» face aux exigences des créanciers (la BCE, la Commission européenne et le FMI).

Ce référendum a choqué la troïka, qui avait prévu d’exiger de Tsipras encore plus de concessions et sa capitulation totale face à leurs dernières demandes d’austérité draconienne. Ces institutions voulaient humilier SYRIZA et le peuple grec en envoyant ainsi le message clair qu’aucun mouvement anti-austérité ne serait toléré par l’élite européenne. Mais l’arrogante et autocratique Troïka a été trop loin.

Tsipras était également soumis à une énorme pression de la classe des travailleurs grecque et de la gauche de SYRIZA pour ne pas continuer à reculer face à la Troïka. Si Tsipras avait accepté les termes de la Troïka, cela aurait pu conduire à une scission au sein de SYRIZA et à la chute du gouvernement. Les enjeux étaient très élevés. En annonçant le référendum, Tsipras a déclaré: « La proposition des Institutions [le nouveau nom de la Troïka] comprend: des mesures conduisant à une plus grande déréglementation du marché du travail, la réduction des retraites, de nouvelles réductions de salaire dans le secteur public et une augmentation de la TVA sur les denrées alimentaires, les repas et le tourisme, tout en éliminant les allègements fiscaux pour les îles grecques ».

La Troïka a également été irritée par la proposition de SYRIZA d’augmenter les impôts sur les plus riches en Grèce et d’augmenter l’impôt des sociétés. Même ces taxes – relativement douces – étaient de trop pour l’eurozone capitaliste.

Certains porte-paroles de la Troïka ont menacé que ce référendum signifierait dans les faits la fin de l’adhésion de la Grèce à la zone euro. Mais, en dépit de leur préparation tant vantée à un «Grexit», les gouvernements de l’Union européenne craignent qu’un départ forcé de la Grèce n’ait d’incalculables répercussions financières, économiques et politiques. Quel pays pourrait potentiellement être le prochain à suivre la Grèce ? Le Portugal ? L’Espagne ? L’Irlande ? L’Italie même ? L’administration Obama est également préoccupée par la chute économique et géostratégique qui pourrait découler d’un Grexit. La Maison Blanche appelle Bruxelles à faire des compromis dans le but de garder la Grèce, membre de l’OTAN, au sein de la zone euro, pour empêcher le régime de Poutine de tirer profit de la situation.

Un mandat Anti-austérité

La section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) en Grèce, Xekinima, a, dès le début du gouvernement de SYRIZA, appelé à systématiquement respecter le mandat anti-austérité qui a été donné par les électeurs grecs. Cela signifiait refuser de payer la dette, en imposant le contrôle des capitaux contre les marchés, et nationaliser les secteurs clés de l’économie sous le contrôle et la gestion démocratiques des travailleurs. À la lumière de la nouvelle crise, le gouvernement de SYRIZA aurait dû stopper la fuite des capitaux en saisissant les biens et les avoirs des grands capitalistes et des grandes entreprises.

Au lieu de cela, Tsipras s’est engagé dans des mois de « discussions » infructueuses avec la Troïka, qui ne veut qu’imposer encore plus de son programme d’austérité antisocial. Cette politique a conduit à l’échec. Xekinima a appelé Tsipras à quitter les dernières « négociations » et à faire appel au peuple grec; à dire la vérité sur ce qui se passe à Bruxelles et à expliquer que les «Institutions» exercent un chantage sur le gouvernement : accepter un nouveau mémorandum d’austérité massive ou être expulsé de la zone euro. Sur cette base, SYRIZA aurait dû adopter une position claire et nette pour quitter la zone euro en liant cela à l’instauration d’un programme socialiste destiné à remettre l’économie sur pieds dans l’intérêt des travailleurs et des pauvres. Comme l’a expliqué Xekinima, selon les circonstances, cela aurait pu être adopté par le peuple grec par le biais de nouvelles élections, par exemple, et une position combative aurait remporté une victoire écrasante.

Malheureusement, Tsipras a de nouveau refusé de rejeter totalement l’austérité et les politiques néo-libérales. En fait, le gouvernement grec a même ajouté des propositions de privatisation qui ne figuraient pas dans la liste de la Troïka, y compris la vente de certains aéroports. Tsipras appelle maintenant à la tenue d’un référendum sur le dernier projet d’austérité de la Troïka et a précisé que SYRIZA soutient le «Non», mais sans faire aucune proposition en positif au peuple grec sur ce par quoi remplacer les propositions de la Troïka. Au contraire, il ne se lasse pas de dire qu’un vote «Non» ne serait qu’un outil de négociation destiné à forcer la Troïka à faire plus de propositions «sensibles» au gouvernement grec. Le contrôle des capitaux aurait dû être introduit dès février et les banques immédiatement nationalisées.

Alors que de nombreux Grecs considèrent ce référendum comme un moyen de donner démocratiquement leur avis dans ces événements et comme une chance de riposter contre la Troïka, il contient de réels dangers. Les médias de masse de droite vont passer cette semaine à essayer de jouer sur le chantage et à intimider les travailleurs grecs et les classes moyennes selon la rhétorique qu’il vaut mieux un danger que l’on connaît (un autre paquet de mesures de la Troïka) qu’un que l’on ne connaît pas (le défaut de paiement, l’expulsion de la zone euro et, éventuellement, de l’UE, suivie par un nouvel appauvrissement collectif). Cela peut influencer certains Grecs, mais peut aussi en repousser encore plus d’autres.

La politique des dirigeants de SYRIZA repose toujours sur les négociations avec la Troïka, plutôt que d’opérer une réelle rupture avec l’austérité sans fin de la zone euro des patrons en introduisant des politiques favorables à la classe des travailleurs, des politiques socialistes. Tsipras espère revenir à Bruxelles avec le mandat d’un «Non» massif et une position plus forte pour négocier et gagner plus de concessions de la part de la Troïka, dont une diminution de la dette. Mais même en supposant que la Troïka soit toujours prête à négocier avec SYRIZA après la tenue du référendum, tout accord signifiera encore plus d’austérité en Grèce, encore plus d’attaques contre les travailleurs, contre les retraités et contre les pauvres.

Une campagne d’intimidation massive a lieu au travers des médias de masse contrôlés par les armateurs, banquiers et industriels grecs. Ils affirment que les caisses seront vides pour les retraites et les salaires à la fin du mois. Si SYRIZA continue à ne pas présenter de plan d’action et de lutte clair, le danger est réel que la campagne de peur lancée par la classe dirigeante puisse entraîner la défaite du «Non».

Voter «Non» n’est pas assez

Malgré ces critiques, Xekinima s’est entièrement lancé dans la campagne pour le «Non» dimanche prochain. Environ 150.000 tracts et 3.500 exemplaires du nouveau journal de Xekinima ont été imprimés pour cette semaine. Xekinima est par ailleurs fortement impliqué dans la tentative de construire des comités de quartiers pour le «Non», en réunissant les différentes sections de la gauche grecque. Fait intéressant, ANTARSYA (Alliance anticapitaliste de gauche) qui a traditionnellement une approche sectaire envers le reste de la gauche et SYRIZA en particulier, est maintenant énergiquement impliquée dans cette action. Malheureusement, ce n’est pas le cas du KKE (parti communiste grec), qui a adopté une approche résolument sectaire, en appelant les électeurs à gâcher leurs bulletins de vote (c’est-à-dire à s’abstenir). Étant donné le fait que le KKE dispose toujours d’un soutien important parmi les travailleurs, cette approche pourrait aider à la victoire du «Oui». Un tel scénario verrait probablement la chute du gouvernement de SYRIZA et l’arrivée d’une nouvelle coalition dominée par le centre-droit prête à s’entendre avec la Troïka sur l’application de nouvelles mesures d’austérité brutales.

Le «Non» ne sera pas suffisant en soi. Une campagne de masse dans les rues et sur les lieux de travail est nécessaire pour activement impliquer la classe des travailleurs dans l’opposition à la Troïka. Les énormes manifestations appelées à Athènes le 29 juin par SYRIZA ont démontré le potentiel de résistance de masse présent dans le pays. Des comités d’action dans les communautés et sur les lieux de travail peuvent mener la lutte contre la Troïka.

Une rupture décisive avec la Troïka, le refus de payer la dette publique, les nationalisations et un programme de politiques socialistes pourraient disposer d’un énorme soutien parmi la classe des travailleurs et les classes moyennes qui souffrent depuis longtemps. Un appel à la classe des travailleurs européenne pour manifester sa solidarité par des actions de masse pourrait, en particulier dans les autres pays de la zone euro endettés comme l’Espagne, le Portugal et l’Irlande, recevoir un écho immédiat et puissant. La seule véritable alternative à l’austérité et l’Union européenne des patrons, c’est une confédération socialiste européenne sur une base volontaire et égale.