Leclerc, patron voyou!

ob_18c776_007Ceci est le témoignage d’un jeune chômeur ayant participé à l’ouverture d’un Leclerc Drive à Montélimar. Des dizaines de sites de ce type ouvrent depuis plusieurs années en France. Sous couvert d’offres d’embauches se cachent de véritables impostures.
Comment es-tu arrivé dans ce programme ?

A travers Pôle Emploi, 20 personnes ont été sélectionnées sur une série de tests et d’entretiens. La chose était présentée comme une formation de 6 semaines qui débouchait sur un CDI à temps plein. Le job consistait à faire de la préparation et de la livraison de commande pour un entrepôt Drive Leclerc qui ouvrait au mois de mars. Une annonce plutôt alléchante ! Mais le recrutement fut d’entrée hyper compétitif et vu le « profil » des personnes retenues, il semble évident que l’entreprise a fait de la discrimination au faciès.

Selon toi, était-ce justifié de faire cette formation avant l’embauche ?

Dès le début, ça me semblait louche de faire 6 semaines de formation pour simplement préparer des commandes. J’ai vite senti l’embrouille quand j’ai su que c’était une POE (Préparation Opérationnelle à l’Emploi), c’est à dire que ce n’était pas l’entreprise qui nous payait mais que nous touchions juste nos allocations. En réalité, la formation théorique n’a duré qu’une semaine et le reste du temps a été consacré à mettre en place ce nouveau drive, 35 h/semaine. Un bon moyen pour l’entreprise d’avoir de la main d’œuvre gratuite ! D’entrée de jeu, on nous mettait la pression pour être le plus rapide possible. Nous avons même travaillé une journée dans la zone surgelée (-20 degrés) sans que la direction nous ait fourni de combinaison, que des gants et des blousons !

Y avait-il une réelle volonté de tous vous former ?

Nous avons pris conscience que rien n’était sûr pour tout le monde et qu’on nous utilisait avant tout comme de la main d’œuvre gratuite. On nous a dit en formation que si cela ne tournait pas bien au début, ils seraient amenés « à réduire la voilure ». La compétition était donc annoncée d’entrée de jeu.

Comment expliques-tu qu’ils t’aient proposé un CDI pour finalement te licencier dans la période d’essai alors qu’ils te connaissaient déjà depuis plusieurs semaines ?

C’est là que vient le second vice. En plus d’être dispensé de verser un quelconque salaire, l’entreprise qui emploie des chômeurs sous couvert de « formation » reçoit des aides financières (8€ par heure et par personne, soit 36 000 euros pour l’ensemble du groupe). Pour toucher ces aides, l’entreprise était obligée de faire signer un CDI, peu importe s’ils licenciaient pendant la période d’essai. C’est pour cela qu’ils nous ont fait signer alors qu’ils savaient déjà de qui ils allaient se débarrasser, sans aucun motif valable. Ils avaient déjà prévu de virer les éléments qu’ils considéraient « les plus contestataires ou les plus lents » selon leurs propres dires. Suite à 2 jours d’arrêt maladie sur cette semaine d’essai, une autre collègue a été licenciée. Au final, nous avons été exploités plus d’un mois sans salaire ni cotisation et nous avons perdu un mois et demi de temps d’allocation où nous aurions pu chercher un autre emploi.

Ce récit est un exemple du détournement des aides mises en place par l’Etat, qui au lieu de servir les travailleurs, reviennent dans les poches des patrons qui utilisent ces mesures pour exploiter davantage. Non seulement, ils n’ont aucun frais salarial, mais en plus ils bénéficient d’aides financières, qui s’ajoutent aux richesses produites par les travailleurs. Ce nouveau forfait des capitalistes est l’illustration de l’aggravation de l’exploitation. Dans ce système, toutes les mesures sont faites ou récupérées par les riches et ce n’est que par la lutte que les travailleurs pourront s’émanciper.